Charles Delhez sj –
Noël, une fête aux accents de douceur, de chaleur intime et familiale, qui fait rêver… On parlera de paix et des « joyeux Noël » s’échangeront un peu partout. Nous savons cependant bien qu’il n’en est pas ainsi pour toutes les personnes ni pour tous les peuples. Notre modernité finissante est triste. Heureusement, il n’y aura pas de journaux ce jour-là : nous serons dispensés des mauvaises nouvelles habituelles. Comment en effet fêter la Nativité dans un monde en guerre ? L’Ukraine et la bande de Gaza en sont les noms emblématiques, mais hélas, pas les seuls lieux.
Le pape François parle de guerre mondialisée et perpétuelle.
Qu’il me soit permis, en ces jours de fêtes chrétiennes, de penser à mes frères chrétiens. De l’avis des observateurs, le christianisme est aujourd’hui la religion la plus persécutée dans le monde. Attentats, emprisonnements, perte de liberté religieuse… Les victimes ont presque doublé depuis 2019. 94 % des personnes tuées pour leur appartenance religieuse sont chrétiennes.
En Afrique, la liberté religieuse a été supprimée de la constitution algérienne ; le Nigeria est le pays le plus meurtrier, il y a des chrétiens assassinés en république démocratique du Congo, au Mozambique, au Cameroun, au Burkina Faso, en Centrafrique. Du côté de l’Orient, le christianisme disparaît petit à petit du lieu qui l’a vu naître. Ainsi, en Turquie, le siècle dernier s’est ouvert par le génocide arménien. En 1900, ils étaient 35 % de chrétiens. Aujourd’hui, 0,2 %.
Comment ne pas penser aussi à ceux qui traînent dans les rues, ceux qui frappent aux portes de l’Europe ? Noël se fait bien triste en ces temps qui sont les nôtres. J’aurais aimé entonner une chanson plus joyeuse, un de ces Noëls de jadis. La liturgie est plus réaliste : après le 25 décembre, le 28 : la fête des Saints innocents.
Que cela ne nous empêche pas de goûter à la joie de Noël, la vraie et non celle de l’indifférence. Ce n’est pas de flonflons mais d’espérance que nous avons besoin. Souhaitons au moins qu’une trêve de Noël puisse être signée. Faute de résoudre tous les problèmes, qu’au moins quelques signes nous soient donnés. Le vieillard Siméon qui tenait Jésus dans ses bras et chantait le salut que cet enfant apportait, fermera les yeux avant que celui-ci n’ait annoncé la Bonne Nouvelle jusque sur une croix. Tournons déjà nos regards vers le Ressuscité et osons croire qu’un jour nos désirs les plus profonds de paix et de joie pour tous deviendront réalité. L’espérance est de l’ordre de l’horizon. Faute de pouvoir déjà fouler le sol de la terre promise, puissions-nous en voir les premières lueurs.
Un chant de l’Avent proclame : « Il saura briser nos armes, il saura changer nos cœurs. Il viendra sécher nos larmes, il viendra chasser nos peurs. » N’est-ce pas notre désir le plus profond ? Ne nous laissons pas voler notre espérance, dirait le pape François.
Si je peux faire entendre une chronique si sombre, c’est parce que Noël nous apporte un peu de lumière. Puisse la petite crèche de Bethléem ne pas être oubliée. Elle nous invite à faire un pas de côté par rapport à la course folle et meurtrière de notre monde et à marcher à la lumière d’un enfant, promesse d’avenir.
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